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Dix questions, dix réponses

Où en seront les taux d’intérêt en fin d’année ?

L’évolution des taux d’intérêt cette année sera étroitement liée à celle de l’inflation. Bien que cette dernière semble avoir dépassé son point culminant dans la plupart des pays, le retour à des niveaux que les banques centrales définissent comme la stabilité des prix sera encore long. La Banque nationale suisse (BNS) prévoit certes une diminution de l’inflation, mais aussi un contremouvement à un moment ultérieur. Pour la ramener durablement à son niveau initial, la BNS va donc continuer de relever son taux directeur. Notre scénario principal table sur deux relèvements en mars et juin, qui devraient porter le taux directeur à 1,75%. La Banque nationale veillera à ce que le taux SARON (Swiss Average Rate Overnight) se stabilise au même niveau par le biais d’opérations sur le marché monétaire. Le rendement des emprunts d’État en CHF à 10 ans, sur lesquels la BNS exerce moins d’influence directe, devrait être proche de 1,6% en fin d’année.

L’hypothèque SARON est-elle le meilleur choix ?

Les hypothèques SARON sont le meilleur choix lorsque le risque d’une envolée temporaire des taux hypothécaires à court terme au-dessus des taux des hypothèques fix (comme observée au début des années 1990) est nul ou faible. Comme le zénith du récent cycle d’inflation semble déjà avoir été franchi dans notre pays et que la BNS est parvenue à limiter les attentes inflationnistes grâce à son intervention rapide, nous n’anticipons – au pire – qu’une brève période de taux SARON supérieurs aux taux hypothécaires à long terme actuels. Cette phase devrait se révéler trop courte pour rendre plus intéressante financièrement la conclusion d’une hypothèque fix à longue échéance. Ce n’est que si les taux hypothécaires venaient à augmenter pendant plusieurs années que l’hypothèque fix deviendrait plus avantageuse dans le contexte actuel. Cela dit, les hypothèques SARON ne conviennent pas à tous les propriétaires, puisque ce sont eux qui doivent assumer le risque résiduel d’une hausse inattendue des taux, ce qui peut se révéler financièrement impossible pour certains ménages. Or, ce risque est justement couvert par une hypothèque fix. Pour les ménages avec des ressources financières limitées ou aux nerfs fragiles, les hypothèques fix sont donc souvent le bon choix.

Quand le taux de référence va-t-il augmenter ?

En Suisse, les loyers des baux en cours sont corrélés au taux de référence hypothécaire. Ce dernier se fonde sur un taux d’intérêt moyen calculé par la BNS pour l’ensemble des hypothèques en cours. Comme le nombre d’hypothèques nouvellement conclues ou arrivées à échéance est relativement faible par trimestre, l’inertie du taux de référence est élevée. Bien que les taux des nouvelles hypothèques augmentent déjà depuis la fin 2021, le taux de référence ne s’est pas encore détaché de son plancher de 1,25%. Certains observateurs du marché tablent sur une première augmentation en mars 2023, parce que la hausse du taux SARON à 1,0% a impacté une part considérable du portefeuille hypothécaire. Nous ne partageons pas cet avis et ne prévoyons la première augmentation à 1,5% qu'en septembre 2023. Selon nos calculs, la deuxième hausse à 1,75% devrait ensuite intervenir à l'été 2024.

Dans quelle mesure les loyers vont-ils augmenter en 2023 ?

Un relèvement du taux de référence à 1,5% dans le courant 2023 permettrait aux bailleurs d’augmenter les loyers de 3%, sous réserve d’avoir répercuté toutes les baisses précédentes sur les locataires. Mais comme cela concerne moins de la moitié des propriétaires, seule une partie des bailleurs pourront faire valoir la hausse des coûts d’intérêt. Selon la loi, les bailleurs sont toutefois autorisés à répercuter 40% de l’inflation ainsi que l’augmentation générale des coûts sur les locataires. Si la combinaison de ces deux composantes justifie une hausse des loyers, de nombreux bailleurs feront sans aucun doute usage de ce droit. Dans l’existant, nous anticipons de ce fait une augmentation de 4% des loyers. La majorité de cette augmentation ne prendra effet qu'en 2024 en raison du respect des délais de la loi sur le bail. Au vu de la pénurie croissante, les loyers libres devraient quant à eux progresser d’environ 3% sur la même période.

Et les charges ?

Les charges étant généralement calculées à la fin juin, l’envolée des prix de l’énergie en 2022 ne se répercutera intégralement sur les loyers qu’avec le décompte de cette année. Cela concerne surtout les locataires dont les logements sont chauffés au fioul ou au gaz, qui devront supporter une hausse totale des coûts de 58%. Une petite partie de cette progression a sans doute déjà été comptabilisée en 2022, raison pour laquelle les charges de chauffage devraient augmenter d’environ 40% dans le décompte 2023. La forte hausse des prix de l’électricité (+30% en moyenne) va également peser sur les budgets – avec d’importantes disparités d’une commune à l’autre.

À quelles corrections faut-il s’attendre s’agissant de la valorisation des immeubles de rapport ?

Comme nous l’avions anticipé, les biens-fonds directement détenus dans les portefeuilles n’ont, à quelques exceptions près, pas subi de corrections de leur valorisation en 2022. Nous anticipons les premières pour l’année en cours. La hausse des taux d’actualisation devrait en effet mettre sous pression les valorisations. Les fondamentaux positifs sous forme de repli des taux de vacance et de progression des loyers dans les deux principaux segments bureaux et usage résidentiel devraient dans tous les cas limiter la marge baissière – tout comme l’augmentation des revenus locatifs par l’arrivée de nouveaux locataires et/ou un meilleur positionnement des objets par une gestion professionnelle. Cela dit, il faut néanmoins s’attendre à une baisse des valorisations, qui pourrait atteindre 10% répartis sur deux ou trois années.

Faut-il aussi s’attendre à des corrections de prix dans le logement en propriété ?

Les prix du logement en propriété devraient continuer d’augmenter en dépit du repli de la demande en 2023, bien que seulement marginalement. L’offre toujours très limitée reste le principal moteur de cette évolution. Toutefois, les prix pourraient baisser à partir de 2024 en raison de la détérioration de l’environnement de marché, la combinaison de hausse des taux d’intérêt et de prix élevés entraînant tout simplement des coûts trop importants. La demande devrait en pâtir dans des proportions qui, tôt ou tard, rendront nécessaires des corrections de prix. Nous anticipons des replis modérés de moins de 5% pendant une à deux années, l’atonie de l’offre réduisant la marge baissière. Mais accéder à la propriété restera onéreux dans notre pays, les prix de transaction des appartements en propriété n’ayant pour mémoire diminué que de 13,7% après l’éclatement de la bulle immobilière au début des années 1990. Et ce repli avait même été encore plus faible pour les maisons individuelles.

La demande diminuet-elle aussi sur le marché des résidences secondaires ?

L’envolée des intérêts hypothécaires affecte aussi la demande de résidences secondaires, bien que le repli soit moins marqué que pour les résidences principales. Ceci est lié au fait que les logements de vacances, surtout dans les destinations les plus prisées, sont surtout recherchés par des ménages assez fortunés, qui sont moins sensibles aux taux d’intérêt que les ménages seuils. Dans la plupart des destinations touristiques, il est en outre aujourd’hui impossible de construire de nouveaux logements de vacances sans restrictions d’utilisation, raison pour laquelle de tels biens sont très recherchés. Des baisses de prix restent bien entendu possibles si le marché ralentit encore, mais des disparités importantes seraient observables selon les localisations.

Le télétravail réduit-il la demande de surfaces de bureau ?

L’avancée des formes de travail flexible n’est que l’une des tendances perceptibles actuellement dans l’immobilier de bureaux suisse. Répondre à cette question n’est donc pas si simple. Au vu de l’extraordinaire croissance de l’emploi enregistrée en 2022 et de la demande accumulée pendant la pandémie, durant laquelle de nombreuses entreprises ont reporté la location de nouvelles surfaces de bureau, le taux d’offre aurait théoriquement dû reculer bien plus vigoureusement. De fait, cette baisse n’a été que de 5,8% en 2021 et 5,6% en 2022. Par rapport aux phases comparables précédentes, les entreprises semblent donc moins demandeuses de surfaces supplémentaires. Les taux de vacance recensés officiellement dans quelques villes et cantons brossent une image similaire: la somme des surfaces inoccupées a certes diminué en glissement annuel, mais dans des proportions bien plus modérées que pendant les précédentes phases de forte croissance de l’emploi. L’effet télétravail devrait affecter la capacité d’absorption du marché encore un certain temps, avant que de grandes tendances comme la numérisation et la tertiarisation du paysage sectoriel helvétique entraînent de nouveau une hausse sensible de la demande de surfaces de bureau.

Les investissements immobiliers restentils intéressants malgré la hausse des taux d’intérêt ?

Même après la fin de cette période exceptionnelle au cours de laquelle l’immobilier était tout simplement incontournable, cette classe d’actifs reste attrayante. La prospérité d’un pays se traduit tôt ou tard toujours par une croissance des prix des terrains. Or, la rareté du sol va continuer de s’accentuer en Suisse, surtout dans les prochaines années. L’immobilier restera donc une composante importante de presque tout portefeuille. De plus, les prix records payés jusqu’au printemps 2022 appartiennent désormais au passé et les niveaux ont tendance à se normaliser progressivement.

(Source Credit Suisse Group AG)​​​​​​​​​​​​​​​​​​​​​